L comme Légendes
- Hervé Fauve
- 14 nov. 2022
- 3 min de lecture
Dernière mise à jour : 19 nov. 2022

« Quand la légende est plus belle que l’histoire, on imprime la légende. », telle est la conclusion d’un western avec l’inoubliable John Wayne, « l’homme qui tua Liberty Valance ». Une sentence qui s’avère souvent exacte.
Pour ma part, inlassablement, je vérifie chaque légende. Elles peuvent s’avérer fausses, ou exactes. Mais, parfois l’histoire surpasse la légende.
L’inventeur du télégraphe
Veuve à 31 ans, avec 3 enfants, ma mère s’était remariée avec un officier de marine, Roger Piot-Chappe. J’avais 7 ans, il m’expliqua fièrement qu’il descendait du frère de Claude Chappe, l’inventeur du télégraphe.
Un autre de ses ancêtres, un chevalier, avait été tué aux croisades. Ce dernier appartenait à la famille de Molon, celle de l’une de ses arrières-grand-mères. Il en avait également un qui était mort lors de la retraite de Russie, dans la grande armée de Napoléon.
Je n’exclus pas que ces récits aient alimenté les prémices de ma future passion pour la généalogie. Avais-je des ancêtres qui me feraient rêver ?
En 1979 je me lançais dans les recherches généalogiques. Il fallait se déplacer. C'était long, laborieux, les progressions se faisaient date par date, ma propre généalogie m’occupait trop pour que je prenne le temps de m’intéresser à la sienne. Il mourut, emporté par un cancer, à 48 ans, laissant ma mère veuve une seconde fois, elle avait 46 ans, c’était en 1983.
Les années ont passé. Ma généalogie plafonne, j’atteins souvent les XVIe et XVIIe siècles, je suis bloqué quand l’état civil cesse d’exister.
Un peu par désœuvrement, j’ai commencé à me tourner vers les généalogies de mes proches, dont celle de mon beau-père, et à m’attaquer à la légende de sa parenté avec Claude Chappe. Je me rendis rapidement à l’évidence, il n’y avait aucun lien.
Les ancêtres paternels de mon beau-père vivaient dans les Ardennes, et malgré les énormes lacunes de l’état civil, conséquence des conflits du XX siècle, l’absence de parenté était patente. Rien ne correspondait, les dates, les lieux… L’inventeur du télégraphe venait de la Sarthe, pas des Ardennes…
Deux arrière-grands-pères de mon beau-père avaient épousé deux sœurs, des demoiselles Demolon. Ses deux grands-parents paternels étaient cousins germains. Chappe était juste le nom de de sa grand-mère paternelle.
Toute sa vie, il avait cru à ce qui n’était qu’une légende, fondée sur une homonymie avec un homme illustre.
Une trisaïeule de noble ascendance
En ce qui concerne son ancêtre mort en Russie et l’autre aux croisades, impossible de vérifier. Les renseignements étaient trop vagues et les lacunes de l’état civil représentaient un obstacle de taille.
Et pourtant… j’allais découvrir une ascendance inattendue qui l’aurait sidérée.
Je découvre rapidement que sa trisaïeule (sa Sosa 31) s’appelait Anne de Chaussecourte. Le grand-père de cette trisaïeule était un aristocrate. Il avait épousé une roturière, au grand scandale de sa famille qui l’avait exclu et rejeté, un peu avant la révolution.
Cette famille, descendait, entre autres, des Polignac, dont une branche est l’actuelle famille régnante de Monaco. Elle avait une ascendance prestigieuse.
Elle descendait de Diane de Poitiers (sosa 63847), maitresse du roi Henri II, d’Agnès Sorel (sosa 255387), maitresse du roi Charles VII (sosa 255386) qui se révèlait être aussi son ancêtre.
L’établissement de sa généalogie devient un jeu d’enfant. Les sites Internet consacrés aux ascendances et descendances royales sont légion.
Le château du côté de sa mère
Et là, je me souviens d’une visite faite en famille, dans ma jeunesse, au château de Chenonceaux. Roger, mon beau-père avait été littéralement subjugué par le charme de celui qui compte parmi les plus beaux châteaux de la Loire. Ce château avait été celui de Diane de Poitiers, son ancêtre, qui l’avait reçu de son royal amant, Henri II.
C’était le château de son ancêtre, une demeure familiale en quelque sorte, le château de sa lointaine grand-mère…
Je découvre aussi qu’il descend des Visconti de Milan, des Wittelsbach de Bavière, des Habsbourg d’Autriche et de toutes les grandes familles qui ont fait l’histoire de l’Europe au moyen-âge, bien au-delà de son ancêtre mort aux croisades, que j’ai pu retrouver…
Finalement l’histoire était plus belle que la légende, et il aurait aussi aimé celle-ci. Mais j’imagine que l’absence de parenté avec Claude Chappe, cette illusoire légende familiale, l’aurait affecté.
À bientôt pour une nouvelle descente dans mon abime.


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