En roulant dans la corbeille de la guillotine le 21 janvier 1793, la tête de Louis XVI allait conduire mes ancêtres à changer de nom. Mon nom est Fauve, je vais vous expliquer pourquoi.
Un nom de famille qui devient bien encombrant
En 1814, Louis XVIII, frère de Louis XVI devient roi de France après l'abdication de Napoléon.
En ce 15 février 1815, François Fauvre s’apprête à déclarer à la mairie la naissance de son dernier fils, Antoine. Il est prudent, il ne va pas déclarer son fils sous le nom de Fauvre, mais de Fauve. Son père, Jacques Fauvre, mort 10 ans plus tôt s’enorgueillissait d’une parenté possible avec le député conventionnel Charles Fauvre Labrunerie qui avait voté la mort de Louis XVI en 1793, en l’an 1 de la République. Aujourd’hui, il serait malvenu de le faire.
Ci dessous vous voyez le vote de Fauvre-Labrunerie (Labrunerie était le nom de sa mère)
Déjà, lorsque Charles Fauvre la Brunerie s’était opposé au consulat de Bonaparte, cette possible parenté était devenue lourde à porter. Après la restauration de 1814, la parenté était devenue vraiment encombrante. Les Fauvre du Cher avaient tous décidé, d’un commun accord, de ne plus s’appeler Fauvre mais Fauve.
Cette histoire, c’est la légende que l’on se transmet dans la famille depuis plus de 200 ans.
Au fil des ans, elle s’est transformée, faisant de nous les descendants de cet homme qui avait voté la mort de Louis XVI. Rappelons-le, que le Roi avait été condamné à mort à une seule voix près, celle de ce parent supposé peut-être.
Peur des représailles royaliste
La légende était-elle vraie ? Mon arrière-grand-père Gustave Fauve s’était lancé dans la généalogie pour vérifier cette éventuelle parenté.
Dans les années 1920, il avait mené une étude généalogique parallèle de notre famille et de celle de Charles Fauvre Labrunerie. Il fut rapidement bloqué dans les 2 cas par des lacunes de l’état civil et l’absence de tout document notarié qui aurait pu lui permettre de contourner l’obstacle. Il n’avait pas trouvé de lien.
Un changement d’orthographe bien opportun
Une autre question se posait . Cette histoire du changement de nom lié à cette encombrante parente était-elle vraie. Avec l’expérience, je sais combien l’orthographe des noms est aléatoire et que les modifications au fil des ans sont fréquentes. Peut-être que la transformation de Fauvre en Fauve n’avait rien à voir avec cette histoire et relevait tout simplement de la distraction d’un officier d’état civil.
Mais ici, les faits sont troublants et ne semblent pas relever d’une simple coïncidence.
Avant la période révolutionnaire, je ne trouve aucun acte dans lequel Fauvre se serait transformé en Fauve, alors que mes ancêtres ne savaient ni lire ni écrire. Ils auraient été bien incapables de corriger une éventuelle faute d’orthographe sur leur patronyme.
En revanche je relève qu’après la chute de Robespierre et la fin de la terreur les omissions du R de Fauvre se multiplient. Je tombe même sur des actes ou un membre de la famille signe Fauvre alors que dans l’acte il est bien désigné sous le patronyme de Fauve.
De là à soupçonner une certaine indulgence complice de l’officier d’état civil il n’y a qu’un pas que je me garde bien de franchir.
Ce qu’il y a de plus étonnant, c’est de constater que cette transformation est absolument générale pour tous les porteurs du patronyme. À croire qu’un conseil général des familles avait décidé d’arrêter de porter un nom devenu encombrant.
Rétablissement du nom de Fauvre
L’histoire aurait pu s’arrêter là. Mais j’ai découvert qu’une autre branche descendante, avait, sous la 3e République en 1897, décidé de rétablir le patronyme de Fauvre. Ce nom ne sentait plus le soufre après l’abolition définitive de la monarchie.
Ils ont fait une requête, argüant d’une erreur de l’état civil, pour obtenir le droit de rétablir le nom de Fauvre tel qu’il était porté avant la révolution.
Il existe donc aujourd’hui des branches de cette même famille qui porte le nom de Fauvre où Fauve bien que descendants tous d’une même personne et qu'il ne faut pas incriminer une erreur de l'officier d'état civil.
A bientôt, pour une nouvelle descente dans mon abime.
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