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S comme Satibus, le dernier chouan

Dernière mise à jour : 22 nov. 2022



Satibus veut dire Satan en latin, je pourrais même dire le Sinistre Satan. C’est surtout le surnom d’un lointain grand-oncle, réputé pour sa cruauté envers les républicains, pendant la révolution.


Emeute à Pluméliau

Tout commence le 13 mars 1793. La population de Pluméliau, au centre du Morbihan, est rassemblée par les officiers municipaux qui tirent au sort ceux qui, dans le cadre de la « levée en masse », devront rejoindre les « conscrits de l’An II » pour se battre contre les tyrans dont « l’étendard sanglant » est levé contre la France. La population réagit mal et refuse cet enrôlement contraint.

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Les administrateurs de Pontivy décident alors d’envoyer 120 gendarmes et gardes nationaux accompagnés d’un canon afin de reprendre le recrutement par la force.


Le 14 mars, à 11 heures du matin, les gardes nationaux sont rassemblés devant l’église afin de procéder à un nouveau tirage lorsque 2 000 à 3 000 paysans, venus de tous les villages environnants, entrent dans le bourg. Ils sont armés de faux, haches, fourches et autres outils agricoles.

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Parmi ceux-ci, mon ancêtre, Louis Le Dain, et au moins un de ses fils Yves, alors âgé de 15 ans. Peut-être y avait-il d'autres membres de ma famille, mais je l'ignore.

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Une fois dans la place, les paysans chargent en poussant des hurlements, sans laisser aux gardes le temps de se mettre en formation. Epouvantés, ces derniers prennent la fuite, après une courte résistance, poursuivis par les insurgés qui hurlent « Tor é ben » (« Casse lui la tête »). Le soir 15 gardes nationaux et 3 gendarmes ont été massacrés.


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Dans les jours qui suivent, les républicains capturent deux des chefs qui sont guillotinés à Pontivy en même temps qu’un lointain cousin Mathurin Le Gainquis.


Chouans

La chouannerie commençait. Ce fut une guerre civile sans pitié. Exactions, assassinats et meurtres furent fréquents des deux côtés.

Yves le Dain mon lointain grand-oncle, allait rejoindre sans délai les rangs des chouans malgré son jeune âge.


Au bout de quelques années, il fait partie des lieutenants de Pierre Guillemot grand chef chouan de la région surnommé « Le Roi de Bignan ».


Pierre Guillemot, a la réputation de quelqu’un d’impitoyable. Il exigeait fréquemment de ses hommes, tant pour les éprouver que pour s’assurer de leur engagement sans faille en se compromettant, qu’ils exécutent à l’arme blanche des prisonniers ou des hommes suspects de trahison.


Parmi ses hommes les plus fidèles, Yves le Dain est vite surnommé Satibus (Satan en Latin), à cause de sa cruauté. Il est également désigné comme « Le Capitaine de Noyal » (Noyal pour Noyal-Pontivy, sa commune d'origine).


Son surnom de Satibus parle de lui-même, même si la mémoire n’a pas gardé de récit de ce qu’il a pu faire subir à ses adversaires républicains. Il a dû se livrer à des actes qui nous feraient horreur.


Mais face aux armées de la France la chouannerie bretonne perd de la vigueur. Finalement, Pierre Guillemot sera pris et fusillé le 5 janvier 1805. Yves, à l’instar de nombreux chouans, a repris une vie normale.


Les 100 jours

Lors du retour de Napoléon de l’île d’Elbe en 1815, et ce qu’on appelle les 100 jours, qui se terminèrent à Waterloo, la chouannerie reprend. Elle mobilise même sur la Bretagne une partie de l’armée napoléonienne, laquelle fit peut-être défaut à Waterloo.


Louis Le Dain, reprend du service. Il a pu même se retrouver face à Pierre Lansard, frère d’un autre de mes ancêtres.


Après Waterloo et la restauration de Louis XVIII, Louis Le Dain reprendra sa vie de laboureur.


Le dernier Chouan

En 1829, en qualité de « Lieutenant de la première chouannerie, de chef de bataillon de la seconde et blessé », il obtient du Roi Charles X une place de percepteur à Noyal-Pontivy avec un sabre d’honneur.


L’année suivante, après la révolution de Juillet, le nouveau roi, Louis Philippe, lui supprime la moitié de cette pension. Refusant « cette aumône » il reprend du service et se met à la tête d’une bande de réfractaire. Il est alors recherché par la maréchaussée. Mais cela ne durera qu’un temps.


Demeuré célibataire, il finira ses jours à 70 ans, alcoolique, paralysé, en 1848. Il mourra avec la satisfaction d’assister à la chute de ce Louis-Philippe qui l’avait spolié 18 ans plus tôt.


Son souvenir restera vivace, plus de 50 ans après sa mort, au début du XX° siècle son souvenir était encore évoqué dans les fermes de la région.


À bientôt pour une nouvelle descente dans mon abime.


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